A propos du Commandant Guillaume, dit "le Crabe-Tambour"
A quelques jours d’intervalle, deux personnalités de l’armée françaises sont mortes : Pierre Guillaume et Pierre Dabezies. Je n’ai pas eu l’honneur de connaître le premier, par contre, j’ai eu la malchance de croiser le second… Pierre Guillaume (à ne pas confondre avec son homonyme éditeur qui, pour rester dans le registre animalier, préfère les taupes aux marsouins) nous a quitté le 3 décembre. Il avait été immortalisé au cinéma par Pierre Schoendorffer dans Le Crabe-Tambour et dans L’Honneur d’un officier. Né en 1925 à Saint-Malo, il était le fils du général Maurice Guillaume, ancien membre du cabinet Lyautey au protectorat du Maroc et chargé des questions nord-africaines dans l’Etat Français. Scout en 1938, il sort de l’école navale à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Lors de la guerre d’Indochine, il commande une Dinssaut (Division Navale d’Assaut) avec les galons de commandant. Lorsque Mendès-France livrera l’Indochine aux bouchers de Hanoi, le commandant Guillaume ne restera pas de marbre. Il fit tout son possible pour sauver les catholiques tonkinois, organisant l’évacuation de ceux-ci par la marine. Au total, ce sont 700.000 chrétiens qui seront sauvés par mer. L’un des épisodes les plus fameux fut l’évacuation de 700 catholiques de Haiphong par le navire Marie-José qui n’était prévu que pour 100 marins. A titre personnel, le commandant Guillaume sauva 25.000 réfugiés, allant jusqu’à organiser un raid pour débloquer les fidèles de la cathédrale de Phat Diem. Ces actes héroïques ne constituent pas la fin de l’épopée indochinoise du commandant Guillaume. En effet, il décide de quitter l’Indochine en jonque. Il échoue en Somalie où il est capturé par des pirates. Parvenant à s’enfuir, il regagne la France. Il n’a guère le temps de se reposer. Son frère, officier commando, est tué à la tête de ses troupes. Par solidarité fraternelle, le marsouin devient bidasse. C’est à la tête d’une unité d’infanterie (commandos de chasse) qu’il participe à la guerre d’Algérie. Lorsqu’en avril 1961, les généraux se soulèvent contre la tyrannie gaulliste et le bradage de l’Algérie (simple continuité du bradage de l’Indochine et de nos colonies africaines) , le commandant Guillaume se range à leur côté et essaye de rallier la marine. Il dirigera l’OAS dans la région de Tlemcen avant d’être arrêté en mars 1962 et condamné en juillet à 20 ans de prison (et non 8 comme le dit Le Monde). Libéré en 1968 (et non 1966, comme le dit toujours Le Monde), il dirige une société de courtage maritime avec le général Challe. En 1978, il donnera un coup de main à son vieux frère d’arme Bob Denard qui baroude du côté des Comores. De 1981 à 1989, le commandant Guillaume va être commandant adjoint du port de Djeddah en Arabie Saoudite. De retour en France, il se lancera dans la politique au côté de Jean-Marie Le Pen et animera le lundi un Libre Journal sur Radio Courtoisie. Le 4 décembre, un vibrant hommage a été rendu sur les ondes de cette radio par Roger Holeindre, lui-même ancien d’Indochine et d’Algérie. La perte de l’Indochine, voulue par Pierre Mendès-France, est le fruit d’une vision à courte vue. Bien canalisée par la France, encadrée par la dynamique diaspora chinoise (celle que l’on a héritée dans le XIIIe arrondissement et qui serait restée au pays), l’Indochine aurait pu connaître l’essor économique de la Malaisie ou de Singapour pour le plus grand bonheur de sa population. Avec des religieux de la trempe de Mgr Ngô Dinh Thuc, des hommes politiques comme Ngô Dinh Diêm, ou des militaires comme le général Lon Nol, l’Indochine française aurait pu développer ses immenses ressources agricoles(notamment le café, le riz et le caoutchouc) et minière (charbon, pétrole, étain).
Pierre Dabezies aussi a fait l’Indo. Il nous en parlait parfois en cours. Né le 9 février 1925 à Casablanca, Il s’engage dans les FFL en 1944. Saint-Cyrien, il fut officier des troupes parachutistes des troupes de Marine en Indochine, en Corée et en Algérie. Il quitta l’armée en 1966 avec le grade de colonel après avoir été le collaborateur de Pierre Messmer au ministère des Armées. Reçu à l’agrégation de droit public en 1969, il enseigna ensuite à la faculté de droit de Caen. De 1975 à 1978, il dirigea le département de sciences politiques de l’université de Paris I. Ancien conseiller (apparenté PS) de Paris (1977-1983), il se rallia, en 1981, à la candidature présidentielle de François Mitterrand. Dans la foulée, il fut élu député de Paris en juin, avant que son élection ne soit invalidée par le Conseil constitutionnel dès le mois de décembre suivant. Nommé ambassadeur au Gabon d’août 1982 à août 1986, Dabezies se rapprocha ensuite de Jean-Pierre Chevènement. En 1989, alors ministre de la Défense, l’élu de Belfort le chargea d’une mission sur la réforme de Saint-Cyr, Dabezies ne cachant pas son intention de détruire cette école d’officier jugée trop à droite et trop catholique. Après l’arrivée de la «gauche plurielle», il est conseiller auprès de Chevènement, devenu ministre de l’Intérieur. Il a soutenu sa candidature lors de la dernière élection présidentielle. Il m’a laissé le souvenir d’un fanatique républicain, qui nous a tous sacqués aux examens le lendemain des européennes de 1994, déçu qu’il était du score piteux de Chevènement.
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